| Pour bien gérer le changement | Prospect Gestion |
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L’utilisation de la théorie du chaos en management des organisations nous apprend que d’un apparent désordre peut émerger un ordre dans la mesure où nous pouvons non seulement disposer d’une vision pour décoder le bruit ambiant mais aussi être capable de faire face à l’insécurité qu’engendre l’incertitude. Pour ce faire, il nous faut dépasser la vision traditionnelle du management présenté comme une approche rationnelle et accepter, comme manager, de plonger au cœur de notre insécurité. Car naviguer dans l’incertitude exige une bonne dose de sécurité personnelle surtout si nous ne voulons pas nous cacher derrière les techniques de gestion qui incitent à porter davantage attention au travail qu’aux personnes qui l’exécutent. Habituellement, l’incertitude a pour effet d’inciter les personnes, particulièrement les managers, soit à se retrancher dans un territoire connu et à tenter de contraindre la réalité en assujettissant l’entourage et les personnes aux contrôles traditionnels, soit à se projeter vers l’avant en brandissant continuellement le spectre du changement pour ne pas justement se retrouver confrontés à ses effets. Un peu comme si on combattait le feu par le feu! Le changement devient un torrent qui emporte ceux qui s’y retrouvent dans de frêles esquifs tout en forçant les autres à pagayer de plus belle ! L’imprévisibilité de la période actuelle n’est alors plus considérée comme une opportunité de se démarquer mais comme une situation d’où il faut s’extirper au plus vite. D’opportunité, elle devient obstacle que l’on essaie de franchir en la devançant par des changements de plus en plus vides de sens.
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De nombreuses réformes, qui sont en fait des réorganisations administratives déguisées, empruntent à cette attitude de fuite en avant qui, espère-t-on, nous fera gagner du temps. Mais l’imprévisibilité a ceci de particulier, La Palice n’aurait pas dit mieux (!), d’être imprévisible tant dans ses bifurcations que dans son rythme ! Comment, dès lors, utiliser ces caractéristiques pour en faire une véritable opportunité? Effectivement, c’est lorsque tout n’est pas figé que l’on peut créer, imaginer, et sortir des sentiers battus.
Pour mieux comprendre ce phénomène, imaginons un damier de 64 cases qui représenterait, par exemple, une vision de l’univers des organisations publiques. Chaque case reflète la mission propre de chaque entité (par exemple, des écoles ou des centres de santé) et ces missions sont configurées de telle façon qu’elles ne puissent empiéter les unes sur les autres. Si l’on veut alors procéder à une réforme, l’univers des possibles étant cerné par la surface du damier, on ne peut qu’agrandir certaines cases, autrement dit « fusionner » et ce, au détriment des cases qui disparaissent ! Il n’y a pas alors de véritable changement mais qu’une modification des structures, soit du nombre de cases. Si l’on suit cette logique, il n’y a que deux issues possibles : soit l’on fusionne les cases jusqu’à ce qu’il n’en reste qu’une, soit on les multiplie en réduisant leur surface ! Dans l’une ou l’autre de ces issues, il n’y a pas de véritable changement mais une adaptation du paradigme existant. L’imprévisibilité demeure, dans ce contexte, une contrainte dont on doit le plus possible éliminer les effets.
Par contre, si nous prenons comme image une représentation d’un ensemble flou, lequel peut prendre différentes formes, on peut constater que cette imprévisibilité de la forme nous donne une plus grande possibilité de changement. Dans ce contexte, une réforme peut aller au-delà d’une modification de structures pour tenir compte davantage des spécificités de chaque région, par exemple et ainsi ne pas imposer un modèle uniforme. L’orientation clientèle comme la mise sur pied d’équipes semi autonomes représentent des exemples de changement de type deux qui incluent l’imprévisibilité dans la gestion quotidienne et ne cherchent pas à la restreindre. Les possibilités d’adaptation, dans ces approches, sont multiples et laissent une plus grande marge de manœuvre même si elles peuvent générer plus d’insécurité chez les managers en raison justement de leur minimum d’uniformité. Dans ce cas, l’imprévisibilité peut devenir une véritable opportunité.
Dans l’univers chaotique actuel, l’imprévisibilité peut représenter davantage un défi qu’une contrainte. Mais pour en tirer pleinement profit, il faut se rattacher d’une part à une vision claire de ce que l’on souhaite mais aussi être en mesure d’affronter l’insécurité que cette imprévisibilité nous fait vivre. Il est essentiel, comme manager, que notre sentiment de sécurité intérieure soit assez fort pour ne pas avoir à se retrancher vers les instruments de sécurité extérieure représentés par les moyens traditionnels de contrôle. En période d’incertitude, il faut plus qu’en toute autre période, pouvoir s’intéresser davantage aux personnes qu’aux tâches. Or, on ne peut le faire adéquatement si nous ne sommes pas nous-mêmes en relative sécurité. Il y a là un devoir d’apprentissage auquel les managers ne peuvent échapper s'ils souhaitent bien naviguer dans la tourmente actuelle.
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